Les Pensées de Pascal

« Les hommes, n'ayant pu guérir la mort, la misère, l'ignorance, se sont avisés pour se rendre heureux de n'y point penser. »
Divertissement, (Fragment 166, Sellier)

Edition originale de la première lettre provinciale
Lettre escrite à un provincial par un de ses amis sur le sujet des disputes présentes de la Sorbonne (Cote : Ep 0040)

Les Provinciales sont des lettres ouvertes, par le moyen desquelles du 23 janvier 1656 au 24 mars 1657, Pascal prend la défense de son ami le docteur de Sorbonne Antoine Arnauld, l’un des principaux maître du mouvement augustinien en France, contre la censure dont le menaçe la faculté de théologie de Paris. Elles tirent leur titre de la fiction par laquelle elles sont écrites par un honnête homme parisien à un ami que sa condition de provincial empêche de recevoir facilement des nouvelles de la capitale. Ces brochures anonymes de huit à douze pages, écrites en un français élégant et accessible (et non dans le latin des théologiens et des savants), connaissent immédiatement l’un des plus grands succès littéraire du siècle. Pascal est bientôt contraint de se cacher pour échapper aux recherches de la police et des jésuites.

Les quatre premières Provinciales tournent autour des problèmes théologiques de la grâce et de la liberté humaine. La condamnation d’Arnauld acquise, à partir de la cinquième lettre jusqu’à la dixième, Pascal se tourne contre les opinions de morale jugée relâchée répandues par les casuistes et les jésuites, qui conduisent à autoriser toutes sortes de délits, voire de crimes : mensonge, vol, meurtre... Après avoir usé de l’ironie et du comique qui feront son succès, Pascal est contraint de changer de ton à partir de la onzième lettre pour faire face aux réponses très violentes des jésuites. La onzième lettre est consacrée à la défense de sa rhétorique. Bientôt, Pascal passe à la contre-offensive, réfutant les arguments et les citations falsifiées de ses adversaire (Provinciales 12 à 14), et les convainquant de calomnie (Provinciales 15 et 16). Les deux dernières lettres sont consacrées à un retour aux problèmes de théologie de la grâce.

La campagne des Provinciales vise principalement à alerter sur les errements des jésuites le public du monde et surtout les curés des paroisses. A l’appel des curés parisiens, un réseau se constitue dans les villes de Rouen, de Nevers, d’Evreux, qui entreprend d’en appeler aux autorités religieuses, parlementaires et politiques du royaume. Pascal interrompt alors la série des Provinciales pour mettre sa plume au service de cette campagne collective, en composant quatre Écrits pour les curés de Paris.


L’idéal de clarté, de précision et d’élégance dont Pascal a donné l’exemple a marqué jusqu’à ses adversaires posthumes, comme Voltaire et de nombreux polémistes des temps modernes. Certaines lettres contiennent certains de ses morceaux les plus beaux, notamment la conclusion de la XIIe, sur l’éternel combat de la violence et de la vérité, la XIe sur les règles d’une polémique non-violente, et la XVe sur la calomnie.

extrait 12 lettre provinciale édition 1657
Les Provinciales, extrait de la douzième lettre (Cote : Ep 0125)

Les Provinciales paraissent d'abord sous forme de brochures imprimées clandestinement. Lorsqu’elles sont épuisées, le groupe de Port-Royal les fait réimprimer en volumes collectifs qui rencontrent toujours le même succès. Pour leur donner une audience internationale, Pierre Nicole, ami proche de Pascal et d’Antoine Arnauld, les traduit en latin, en y ajoutant des notes indispensables pour la compréhension des problèmes théologiques qui y sont traités. Il faut même traduire ces notes du latin au français, pour les mettre à portée du public.

La Bibliothèque du Patrimoine de Clermont conserve au moins une impression de chacune des 18 lettres à un provincial, certaines d'entres elles sont conservées en recueil relié d'époque, les autres en feuilles. Ces documents sont aujourd’hui mis en ligne sur le site Overnia, ainsi que de nombreux autres pièces de l’œuvre de Pascal et du groupe de Port-Royal.